Lors d’un entretien devant quelques journalistes, dont le contenu a été publié, le Président de la République s’est violemment attaqué à « RT France ». Cela soulève nombre de questions pour nous, membres du Comité d’Ethique de cette chaine.
Le Comité d’Ethique, selon le règlement qui lui est applicable et la convention entre le CSA et la société RT France, peut être consulté dès qu’il y a des doutes sur l’honnêteté, l’indépendance et le pluralisme de l’information et des programmes. Ainsi le recours au Comité d’Ethique devrait s’imposer en cas de comportement présumé fautif. Pour en juger il existe d’ailleurs un dispositif de référence voté en 1971 par les syndicats de la Communauté Economique Européenne. En 2011 il a été renforcé par la résolution 1003 du Conseil de l’Europe, enfin en France, la Charte du Syndicat National des Journalistes vient renforcer ces règles, comme les prescriptions de la Fédération Internationale du Journalisme. Il est donc faux de laisser entendre que le journalisme serait une manière de western permanent, sans foi ni loi.
Si les autorités françaises, et notamment le CSA, ont des observations à formuler sur la pratique éditoriale de RT France, la voie correcte serait de nous en saisir. Quand nous lisons ces paroles, mises dans la bouche du Président Emmanuel Macron par l’hebdomadaire « Le Point » : « Dans l’affaire Benalla comme Gilets Jaunes (sic), la fachosphère, la gauchosphère, la russosphère représentent 90% pour des mouvements sur Internet », cela nous interroge gravement. Ainsi nous pourrions comprendre que nous ne sommes rien de plus que le Comité d’Ethique fantoche d’une supposée « Russosphère », son sauf-conduit et vade-mecum. Ce qui serait dire « que depuis l’étranger », au travers d’appels téléphoniques, de courriels, de textos, de lettres, télex ou d’on ne sait quelles machines secrètes et cryptées, nous recevons l’ordre de fermer les yeux sur la gestion de RT France. Une société de presse dont le but aurait été, entre autres, de participer au déclenchement du mouvement des « Gilets Jaunes » ; tout en soufflant sur le feu du dossier Benalla.
Nous nous en excusons mais, à cette heure l’affirmation présidentielle telle que rapportée par « Le Point » ne nous semble pas crédible, puisqu’aucunement documentée. Au cours de l’été dernier une agence qui se présentait comme « scientifique », a prononcé un verdict comparable, sur le rôle de la « Russosphère ». Après enquête il s’est avéré que les méthodes de travail de cette officine étaient erronées, et qu’elle était financée par un outil d’influence des Etats-Unis d’Amérique.
Peut-être le Comité Ethique est-il aveugle, ou aveuglé. C’est pourquoi, en toute bonne foi et transparence, nous souhaitons être mis en possession de toutes les études et informations ayant conduit à la condamnation présidentielle : celle qui fait de RT France une arme de déstabilisation massive. Mis en possession de ces dossiers, qui démontreraient que RT est un des moteurs qui met en marche certains mouvements de protestation en France, nous pourrions comprendre, enquêter, agir et remédier.
Faute d’éléments contraires nous affirmons donc, après un an d’exercice, qu’hormis quelques confusions liées à des incidents techniques ou aux aléas du direct, nous n’avons constaté aucune dérive assez grave pour être condamnable. Que la hiérarchisation de l’information de RT France diffère des choix opérés ailleurs n’est, selon nous, que l’expression d’une pluralité.
Une vertu recommandée dans toutes les chartes qui régissent la presse.
Pour que l’information soit complète, rappelons avec gravité que notre vigilance s’exerce à titre bénévole. Que nous ne développons aucun lien d’intérêts avec la Fédération de Russie, propriétaire de la chaîne, ni avec ses dirigeants. Il se trouve tout simplement, qu’il y a un an faute de la création de ce Comité d’Ethique, CSA oblige, RT avec ses dizaines de journalistes français déjà engagés et sa chaine prête à diffuser, ne pouvait émettre. Au nom de la liberté, puisque d’autres chaînes étrangères sont, sans entraves, accessibles en France, alors que leurs politiques éditoriales mettent souvent en cause les intérêts de la France, il nous a alors semblé accomplir un acte citoyen en nous portant volontaires. Afin que ce nouvel organe de presse, qui pose un regard différent, puisse exister dans une société d’information qui, nous le répétons, se doit d’être plurielle.
Comité d’Ethique de RT France