Le quitus accordé à Pierre-Claver Maganga Moussavou de réunir le gouvernement pour statuer sur l’ordre du jour proposé par le Premier ministre, a été interprété par l’opposition comme étant une réécriture de la Constitution gabonaise. Ce qui n’est pas le cas.
Depuis le 14 novembre 2018, le Gabon est en proie à une vive polémique suite à l’autorisation donnée par la Cours constitutionnelle au vice-président, Pierre Claver Maganga Moussavou, de convoquer un Conseil des ministres, suite à une requête du Premier ministre, chef du gouvernement, Emmanuel Issoze Ngondet. La présidente Marie-Madeleine Mborantsuo et ses collègues sont accusés d’avoir modifié la loi fondamentale gabonaise. Pourtant, ils ont tout simplement relu ladite Loi, en ses articles 13 et 16. Les dispositions de ces articles de la Loi fondamentale lu par Anthony Adiwa, juge constitutionnel, précisent que : «Dans le souci d’assurer la continuité de l’Etat et du service public, ainsi que le fonctionnement régulier du gouvernement, et en application des dispositions de l’alinéa ajouté à l’article 13 de la Constitution, la Cour constitutionnelle, en sa qualité d’organe régulateur du fonctionnement des institutions, autorise le vice-président de la République à convoquer et à présider un Conseil des ministres qui portera exclusivement sur l’ordre du jour joint à la requête du Premier ministre». Toujours selon la Cours, «En cas d’indisponibilité temporaire du président de la République pour quelque cause que ce soit, certaines fonctions dévolues à ce dernier, à l’exception de celles prévues aux articles 18, 19 et 109 alinéa 1er, peuvent être exercées selon le cas, soit par le vice-président de la République, soit par le Premier ministre, sur autorisation spéciale de la Cour constitutionnelle saisie par le Premier ministre ou un dixième des membres du gouvernement, chaque fois que nécessaire».
Face aux critiques de l’opposition, la présidente de l’auguste institution a tenu à préciser. «La décision ne modifie pas la Constitution. Cette décision prise sur le fondement des articles 83 et 88 de la Constitution permet de trouver une solution provisoire à une question qui n’a pas été traitée par la Constitution. Et c’est donc sur la base de cette saisine que la Cour a statué», a-t-elle indiqué. Elle a aussi rappelé que «c’est parce que nous ne sommes pas dans le cas de la vacance de la présidence de la République ou de l’empêchement définitif, qu’il fallait prévoir des dispositions provisoires pour régler le cas d’une indisponibilité temporaire, qui elle n’est pas prévue dans la Constitution actuellement».
Les juristes, de leur côté, affirment que la Cour constitutionnelle a pleinement exercé son droit et démentent les propos de certains médias. «J’ai lu surtout dans les médias proches de l’opposition des analyses disant que cette décision a été prise ‘à la surprise générale’. Ça n’est pas sérieux d’écrire. C’est tout simplement faux», explique un éminent constitutionnaliste gabonais et enseignant à l’Université Omar Bongo de Libreville. «J’ai également lu que la Cour constitutionnelle avait réécrit l’article 13 de la Constitution. Là aussi, c’est faux. Cette présentation est complètement fallacieuse. Elle n’a fait que préciser le contenu d’une disposition du texte constitutionnel. Ce qui est dans ses missions et ce que font l’ensemble des cours constitutionnelles partout dans le monde». A-t-il ajouté. L’éminent constitutionnaliste gabonais est d’ailleurs soutenu dans sa position par ses collègues de l’université Paris I Panthéon-Sorbonne et de Paris II Panthéon Assas. Marie-Madeleine Mborantsuo a tenu à préciser, au regard de l’actuelle constitution, les conditions prévues pour constater la vacance du pouvoir. «Il est difficile aujourd’hui de parler d’une absence prolongée. L’absence prolongée n’est pas un empêchement définitif», a-t-elle conclu.
Clavier Nguema Tine