Pour le « Financial Times », la préparation d’une attaque des Etats-Unis sur Pyongyang serait si complexe qu’elle rend l’hypothèse d’une entrée en guerre très improbable.
L’année qui s’achève a été marquée par une aggravation de la guerre verbale entre les Etats-Unis et la Corée du Nord . Mais avant de craindre « le feu et la fureur », pour reprendre les mots employés par Donald Trump, il faut examiner les différents préparatifs logistiques et militaires « qui devraient précéder de façon quasi certaine » une telle attaque, écrit le « Financial Times » . Le quotidien britannique s’est livré à l’exercice en interrogeant plusieurs experts, pour en arriver à la conclusion suivante : « La complexité de ces préparatifs vient nous rappeler pourquoi une attaque est improbable. »
700.000 soldats nécessaires
Il y a d’abord la question des 200.000 citoyens américains vivant en Corée du Sud, auxquels s’ajoutent les 50.000 présents au Japon. Avant d’entrer en guerre, « Washington chercherait très vraisemblablement à les évacuer, note le journal. Mais cela nécessiterait une opération logistique de grande ampleur, qui pourrait servir de détonateur à une action préventive du régime nucléaire de Kim Jon-Un. »
Dennis Blair, ancien responsable des forces armées américaines dans le Pacifique, pointe d’autres défis : le transport des troupes et du matériel nécessaire à une attaque, le rappel de réservistes, la mise à l’abri des civils… Bref, « toutes les actions à mettre en oeuvre si vous pensez qu’un conflit sérieux est possible. » Kim Yeol-soo, de l’Institut coréen des affaires militaires, estime qu’une attaque nécessiterait près de 700.000 soldats américains, 160 navires, 1.600 avions et 2,7 millions de réservistes sud-coréens.
L’impasse nucléaire
Dernière difficulté : même si les Etats-Unis savaient précisément où est caché l’arsenal nucléaire nord-coréen , le seul moyen de le détruire sans préparatifs visibles serait d’utiliser l’arme atomique en premier – une hypothèse que M. Blair juge « inconcevable ». Ce serait comme ouvrir la boîte de Pandore, poursuit-il, et cela ferait des Etats-Unis la première puissance de l’histoire à utiliser l’arme nucléaire à des fins coercitives depuis Hiroshima et Nagasaki. ».
Pour le « Financial Times », il est probable que les Etats-Unis choisiraient d’autres options s’ils voulaient entrer en guerre, comme des bombardements ciblés sur des usines d’armement ou un assaut visant à renverser le régime. Mais cela nécessiterait de commencer par envoyer des troupes. « Les forces américaines basées en Corée du Sud ne pourraient y arriver seules », estime Kim Woo-chul, ancien officier de renseignement de l’Armée de l’air sud-coréenne. « Il faudrait d’abord faire venir les troupes des bases américaines d’Okinawa », affirme-t-il, en indiquant que la Corée du Sud ne compte que 30.000 soldats américains… à comparer aux 7,5 millions de réservistes que compte la Corée du Nord.
Benoît Georges, chef de service – Les Echos
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