« […] Après les concertations préliminaires de la conférence de Bandung qui affirma, avec éclat, à la face du monde et par la voix des peuples d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine, le droit à l’autodétermination et à l’indépendance des peuples coloniaux, donnant ensuite le signal décisif de l’ébranlement et de l’effondrement généralisé de l’odieux système colonial, le Mouvement des Non-Alignés est né voici maintenant vingt-deux ans à Belgrade, à l’initiative de ses pères fondateurs qui ont pour noms Nehru, Sukarno, Nasser, Tito, des héros de l’humanité dont l’histoire gardera éternellement la marque profonde.
[…] Nous devons poursuivre avec persévérance notre action en dépit des obstacles et des échecs momentanés en recherchant constamment à renforcer notre cohésion, car la paix, l’indépendance des peuples et la démocratisation des rapports internationaux pour le progrès global de l’humanité méritent que nous leur consacrions tous nos efforts, toute notre intelligence et tout notre courage, particulièrement à cette époque où le gigantisme des arsenaux nucléaires fait planer sur le genre humain la menace permanente de sa folle autodestruction. Dans notre monde en proie à de multiples convulsions, la recherche constante de la paix doit être l’impératif majeur de notre mouvement, car sans la paix, aucun des objectifs que nous poursuivons ne pourra être atteint.
Pour nous, peuple de Haute-Volta, sous la direction du Conseil du salut du peuple, le non-alignement doit être compris d’abord comme notre autonomie permanente de décision, comme la non-ingérence dans les affaires intérieures des États. Mais nous ne confondons cependant pas le non-alignement avec la complicité ou la passivité devant les crimes de l’impérialisme contre l’indépendance et la liberté des peuples. Ni la non-ingérence avec l’aveuglement devant les crimes des forces réactionnaires contre la liberté de leurs peuples et le respect de leurs droits. Notre appartenance au Mouvement des Non-Alignés nous ordonne, parmi nos nombreuses tâches, de barrer la route à toutes les forces qui ambitionnent d’aligner notre peuple. L’Afrique du Sud est de celles-là. Le non-alignement responsable nous interdit de nous taire lorsqu’on assassine des hommes, des femmes et des enfants qui n’ont commis d’autres crimes que celui de penser à la notion, si lointaine pour eux, de liberté. Depuis le 7 novembre 1982, au nom des justes et des progressistes principes que le Conseil du salut du peuple a tracés en prenant le pouvoir, le peuple voltaïque se sent plus proche de tous ceux qui luttent pour la justice, la liberté et la démocratie. […] Le peuple de Haute-Volta vit dans sa chair les cruautés que subissent des hommes géographiquement loin de lui, mais désormais si proches par la détermination commune à dénoncer le racisme, cette autre force de fascisme. Nous voulons dire à tous ceux qui sont victimes des harcèlements des bandits d’Afrique du Sud que nous épousons totalement leur lutte. Nous saluons les forces populaires du Mozambique et de l’Angola qui repoussent victorieusement les hordes que les sinistres impénitents de Pretoria continuent de leur envoyer. Notre mouvement a déjà condamné l’Afrique du Sud et il doit continuer de le faire.
À quand la condamnation réelle de tous ceux qui, dans l’ombre comme au grand jour, apportent à Pretoria un soutien financier, économique, diplomatique et militaire ? »