L’un après l’autre, les régimes arabes supplétifs des Etats-Unis vacillent.
L’un après l’autre, les régimes arabes supplétifs des Etats-Unis vacillent. Après la révolution de jasmin en Tunisie, qui s’est conclue par une révolution de palais qui a chassé du pouvoir Zine El Abidine Ben Ali et son clan, avec le soutien de l’armée, d’une partie de l’appareil sécuritaire et de larges courants du RCD, le parti hégémonique, le même scénario s’est reproduit en Egypte. Si le fer de lance de cette révolte égyptienne a été la classe moyenne occidentalisée, les autres catégories sociales et forces politiques ont vite rejoint le mouvement, sous le regard complaisant de l’armée. Si cette révolte n’a pas encore triomphé, elle n’en a pas moins réalisé deux objectifs : elle a mis fin définitivement au scénario de la succession dynastique d’une part, et d’autre part a exclu toute tentative d’un renouvellement du mandat de Hosni Moubarak.
Deux autres piliers du système de sécurité pro-occidental dans la région, la Jordanie et le Yémen, sont fortement ébranlés. Mais si la situation en Jordanie est encore sous contrôle, ce n’est pas le cas du régime yéménite du général Ali Abdallah Saleh, qui préside aux destinées de ce pays depuis 32 ans. Comme pour Moubarak, la révolte populaire a déjà contraint ce général, qui a commencé son règne en s’opposant à son voisin saoudien et a longtemps été l’allié de Saddam Hussein avant de sceller une alliance stratégique avec les Etats-Unis dans leur guerre contre le terrorisme, à faire son mea culpa : il ne briguera pas un nouveau mandat et il exclut une succession dynastique.
Confronté à une fronde au Sud et à une guerre au Nord (les Houthistes soutenus et armés par l’Iran), le voilà en face d’une révolte populaire généralisée.
Plus de 20 000 manifestants se sont rassemblés ce jeudi 3 février dans les rues de Sanaa pour réclamer un changement de régime et signifier au président Ali Abdallah Saleh que sa promesse de quitter le pouvoir en 2013 n’est pas suffisante. D’autres rassemblements sont prévus à travers le Yémen. Comme au pays de Moubarak, ses partisans sillonnent la capitale munis de mégaphones pour inviter les habitants à se joindre aux contre-manifestations. En début de matinée, la mobilisation des contestataires était sans précédent depuis le début du mouvement, entamé il y a deux semaines. « Le peuple veut un changement de régime ! Non à la corruption ! Non à la dictature ! », scandaient les manifestants. Entre autres concessions, le président s’est engagé le 2 février à céder le pouvoir à la fin de son mandat, qui expire en 2013, et a lui aussi exclu que son fils lui succède, ce qui n’a pas apaisé ses détracteurs. « Aujourd’hui, nous allons accentuer la pression sur le président Saleh, qui devra faire davantage de concessions à l’opposition », a lancé le 3 février Wael Mansour, l’un des organisateurs de la manifestation du jour.
Les enjeux sont d’importance pour ce pays en proie à un regain d’activité d’Al Qaïda, mais aussi à une guérilla séparatiste au Sud et à un soulèvement chiite dans le nord, le tout sur fond de pauvreté endémique. Un tiers des Yéménites souffre régulièrement de la faim. Washington compte fermement sur l’action de Sanaa face aux extrémistes islamistes dont les activités s’étendent au-delà de la frontière saoudienne et qui mettent en péril la stabilité de l’ensemble de la région. Selon l’agence de presse officielle Saba, Barack Obama a téléphoné à son homologue yéménite pour saluer son initiative de mercredi. « Vous avez bien géré la situation et j’ai hâte de coopérer avec vous dans le cadre d’un partenariat bénéfique pour nos deux pays », lui aurait-il déclaré. Il n’est pas sûr que ces vœux pieux trouvent un début de réalisation.
(Avec les agences de presse)