Le mandat français, en institutionnalisant, dès 1920, le partage du pouvoir politique et administratif entre les dix-huit communautés libanaises, a créé une instabilité chronique au Liban qui se traduit tous les dix ans par des guerres civiles.
Les quelques milliers de personnes qui ont manifesté en avril dernier à Beyrouth (photo) pour réclamer l’abolition de ce système prêchent dans le désert, tant les clivages communautaristes sont ancrés dans les têtes et dans les faits. Mieux, cet odieux système, loin de s’essouffler, a été importé par les néoconservateurs américains en Irak.
L’appartenance communautaire est un marqueur indélébile pour les Libanais. Elle empêche les couples mixtes de se marier civilement, les obligeant à convoler à l’étranger, à moins que l’un des deux époux ne se convertisse. Au moment du décès, les règles de succession diffèrent suivant les rites. Des quotas limitent l’accès aux hauts postes administratifs dont l’attribution répond donc rarement à des critères de compétence. Les mandats politiques, du sommet de l’État aux conseils municipaux, sont partagés à l’unité près. À l’Assemblée nationale, la norme fixe l’égalité des sièges entre chrétiens et musulmans, et la répartition de chaque moitié entre les différentes confessions.
Le partage du pouvoir repose sur le recensement de la population effectué en 1932. Depuis, aucun gouvernement ne s’est risqué à réaliser un recensement communautaire. Et pour cause : cela pourrait conduire à une redistribution des cartes en faveur des chiites. Et à une nouvelle guerre civile.