Irak à croire les médias dominants, peu de monde contesterait le régime d’Al-Maliki par les armes, hormis le groupe État islamique d’Irak. Il n’en est rien : la lutte armée est plus active et combative que jamais dans tout le pays.
Le 7 mars, les bureaux de vote à peine ouverts, les agences de presse annonçaient que chaque Irakien bravait le terrorisme pour mettre son bulletin dans l’urne. Depuis deux mois, le bilan de Nouri al-Maliki en matière de sécurité était présenté comme positif. Autrement dit, on avait l’impression que ne restait dans la clandestinité que le groupe État islamique d’Irak, dont fait partie Al-Qaïda au Pays des deux fleuves, accusé des attentats aveugles à Bagdad (25 janvier, 37 morts), à Baqouba (3 mars, 33 morts) et à Nadjaf (6 mars – 3 morts) ; et soupçonné de ceux des 26 janvier, 1er février et 6 mars à Bagdad (respectivement 54, 22 et 36 morts). Telle n’était évidemment pas la situation.
Pas de solution sans la résistance
Entre le 1er janvier et le 7 mars, heyetnet.org, l’agence de presse du Front du djihad et du changement, un des principaux regroupements résistants, a rendu compte d’une trentaine d’opérations conduites par les Brigades de la révolution de 1920, Ansar al-Sunna, l’Armée des moudjahidine, l’Armée al-Rashidin, l’Armée Tabi’in et la Ligue al’Iraq al-Jihadiya, à Bagdad, Bassora, Tikrit, Taji, Kirkouk, Baqouba…, c'est-à-dire pratiquement dans tout le pays. Qui en a entendu parler ? Il s’agissait d’attaques au mortier de la Zone verte, de quartiers généraux des forces américaines, des ambassades américaine et britannique, d’aéroports. Des véhicules blindés ont été détruits, des GI’s et des auxiliaires irakiens tués.
Les journalistes occidentaux n’ont aucune excuse pour expliquer ce silence. À la différence des autres fronts de la résistance, tous aussi actifs mais qui méprisent les médias ou communiquent mal, le Front du djihad et du changement alimente régulièrement son site d’informations en anglais sur Internet. Harith al-Dari, son porte-parole, secrétaire général de l’Association des oulémas musulmans, réagit rapidement aux événements. Par exemple, il n’a pas hésité à condamner en janvier l’assassinat d’un cheikh de la tribu Obeid à Abou Ghraib, puis l’attentat visant des pèlerins chiites à Kerbala le 4 février (40 morts). Il a commenté les résultats des élections législatives, mais ses analyses ne retiennent pas l’attention de la presse occidentale. Pourtant, tout le monde sait qu’aucune solution n’est possible en Irak sans un dialogue avec la résistance.
En revanche, la moindre déclaration d’Omar al-Baghdadi, improbable dirigeant de l’État islamique d’Irak, tué mi-avril dernier pour la énième fois, était rapportée avec célérité. Question d’attaché de presse, sans doute. C’est, en effet, Site Intelligence Group qui transmet ses communiqués aux médias. Cette société basée à Houston (Texas, États-Unis), dirigée par Rita Katz, juive d’origine irakienne, diplômée de l’université de Tel-Aviv, surveille les activités des organisations islamiques radicales sur Internet pour le compte du Pentagone et du FBI.
Pour que l’omertà sur les activités de la résistance irakienne cesse, les médias devront attendre le feu vert du Pentagone. Cela n’en prend pas le chemin. Depuis le 7 avril, parallèlement aux attentats attribués à grand bruit à Al-Qaïda – alors que Téhéran serait impliqué –, la résistance a revendiqué une à deux opérations par jour sans que la presse n’en rende compte. Tant que 50 000 GI’s seront basés en Irak et que l’Iran manipulera ses agents locaux, la résistance ne déposera pas les armes. Éric Olson, commandant l’US Special Operations Command, le sait. Au lendemain des législatives, il a annoncé que le « retrait » d’Irak ne concernerait pas 4 500 membres des Forces spéciales.