Mondial 2010 Les six ambassadeurs africains sauront-ils défendre les couleurs d’un continent qui accueille pour la première fois, en juin prochain, l’événement ? Rien à dire sur les talents des joueurs qui rivalisent désormais avec leurs homologues européens et sud-américains. Mais beaucoup sur l’encadrement qui refuse presque toujours de confier leur entraînement aux nationaux. Les « experts » étrangers valsent, tandis que les équipes pratiquent ce qu’elles font le moins bien :
un jeu défensif à mourir d’ennui. Leurs chances, néanmoins, sont réelles.
Entre le 11 juin et le 11 juillet, se déroulera, dans neuf villes et dix stades sud-africains édifiés pour la circonstance, la 19e édition de la Coupe du monde de football. Ce sera la première fois que la plus prestigieuse et la plus universelle des compétitions aura lieu sur le sol africain (contre dix en Europe et sept en Amérique).
Le culte de l’argent
South Africa 2010 mettra de nouveau en lumière la rivalité Europe-Amérique du Sud. Loin de s’estomper au fil des années, celle-ci n’a fait que s’aggraver pour atteindre, comme en 1966, 1978, 1986, 1990, 1998 et 2002, sa cote d’alerte. Quatre-vingts ans de combats – qui ne furent pas toujours loyaux – laissent des traces qui ne s’effaceront pas aisément, surtout à une époque où la communion des esprits ne saurait se réaliser dans la reconnaissance par tous de la nature artistique du football. Depuis l’accession en juin 1998 du Suisse Joseph S. Blatter (qui briguera un quatrième mandat en 2011) à la tête de la Fédération internationale de football association (Fifa), l’art du ballon est, hélas ! devenu une préoccupation… anachronique. Le culte de l’argent règne en maître absolu sur toutes les hautes compétitions. Les marchands du stade – télévisions, firmes d’articles de sport, publicitaires, sponsors, communicateurs… – se sont emparés du spectacle sportif, veau d’or de notre nouveau siècle. La logique du profit et de la rentabilité financière a incité la Fifa, véritable multinationale du ballon, à confier, en mai 2004, l’organisation de cette 19e Coupe du monde à l’Afrique du Sud, puissance financière du continent, au détriment du Maroc, candidat malheureux en 1988, 1992, 2000 et 2004.
Le Mondial 2010, à défaut de perspectives résolument optimistes, pose une série de problèmes dont certains seront nouveaux pour la plupart des trente-deux finalistes. Et notamment les six ambassadeurs de l’Afrique : Afrique du Sud, Algérie, Cameroun, Côte d’Ivoire, Ghana et Nigeria. Le déroulement de la 27e Coupe d’Afrique des nations (Can) en Angola, au mois de janvier, a laissé une impression d’inachevé tellement les footballeurs algériens, camerounais, ivoiriens et nigérians et, à un degré moindre, ghanéens, avaient rendu une copie quelque peu insipide, sans trace d’inspiration. Et pourtant, le talent individuel est loin de manquer aux cinq équipes.
Dans le contexte du duel sans merci entre l’Europe et l’Amérique du Sud stimulé par le culte de l’argent et du nationalisme, les ambassadeurs africains voudront-ils – et pourront-ils – défendre, avec le panache que l’on est en droit d’attendre de cette partie du monde où le football offensif a des centaines de millions de fidèles, et de cinq pays (Algérie, Cameroun, Côte d’Ivoire, Ghana et Nigeria) qui ont donné naissance depuis des lustres à des joueurs de grande classe, le périlleux exercice de bien représenter le continent ? Ils devront avoir leur mot à dire, même si leurs dernières sorties ne leur permettent pas d’espérer tenir les premiers rôles. Il y va de la crédibilité du ballon d’Afrique.
Les représentants de l’Afrique abordent ce Mondial 2010 avec une certaine absence de complexe. La victoire de l’Algérie sur l’Allemagne (2-1), futur vice-champion du monde, en 1982, l’accession du Maroc au second tour du Mundial 86, l’inoubliable parcours des Lions indomptables du Cameroun lors du Mondiale 90, les bonnes performances du Nigeria aux États-Unis en 1994 et la victoire du même Nigeria au tournoi olympique d’Atlanta en 1996, l’exploit des Lions du Sénégal, quarts de finalistes en 2002, sont autant de résultats probants qui ont transformé l’état d’esprit des footballeurs africains de l’élite. Le temps est révolu où il fallait seulement participer et limiter les dégâts. Depuis 1990, les Africains visent la victoire et, au moins, la qualification pour les demi-finales. Le blocage psychologique qui avait, en 1974, causé la faillite des Léopards de l’ex-Zaïre, l’a cédé à la volonté de rivaliser avec les meilleurs.
Par ailleurs, est-il besoin d’ajouter que les joueurs africains de top niveau évoluent tous, à quelques exceptions près, dans les championnats professionnels d’Europe ? Qu’ils y affrontent régulièrement des adversaires européens ou sud-américains qu’ils vont croiser sur leur route à l’occasion de South Africa 2010 ? Ils savent d’ores et déjà à qui ils auront affaire et n’ignorent pas comment en découdre avec eux. Ils ne partent plus en terrain inconnu.
Mais que vaudrait cette absence de complexe sur le plan sportif si elle n’était pas sous-tendue par une motivation matérielle conséquente ? Entre les amateurs marocains de 1970 ou zaïrois de 1974, et les pros nigérians ou sud-africains de 1998, sénégalais de 2002 ou ivoiriens de 2006, il y a un monde. Aujourd’hui, avec les royalties versées par la Fifa (3, 51 milliards de francs CFA pour les trois matchs du 1er tour), celles provenant des contrats de sponsorisation et les primes d’encouragement consenties par les autorités de tutelle, une participation à la phase finale de la Coupe du monde, c’est pratiquement fortune faite pour tout joueur inscrit sur la fameuse liste des vingt-deux.
À l’occasion de la Coupe du monde, aucun pays qualifié n’hésite à offrir une préparation sophistiquée à son équipe nationale. On ne calcule pas pour financer des stages et des tournées en Europe et au Brésil, pour conclure des rencontres amicales, pour contracter des assurances pour les professionnels, leur fournir une assistance médicale de qualité, les héberger dans des établissements hôteliers haut de gamme, leur procurer des équipements dans le vent… On leur offre aussi des maîtres entraîneurs ou prétendus tels qui débarquent chacun avec son armada d’adjoints et de préparateurs, et on se met en quatre pour accéder à tous les desiderata des « professeurs ès ballon ». Bref, la prise en charge est à la fois totale et exceptionnelle. Et dans le domaine de l’encadrement matériel et technique, les six sélections africaines n’ont rien à envier à leurs rivales.
Dans celui purement technique, le talent africain ne se discute plus aujourd’hui. Les progrès accomplis par les footballeurs de l’exode se vérifient chaque week-end. Ils concernent d’abord l’aspect purement défensif du jeu. Les Can 2008 et 2010 ont confirmé le niveau remarquable des arrières ghanéens John Pantsil (Fulham, Angleterre), Samuel Inkoom (Bâle, Suisse), Hans Adu Sarpei (Bayer Leverkusen, Allemagne) et Eric Addo (Roda, Hollande), nigérians Joseph Yobo (Everton, Angleterre), Taye Taiwo (Marseille), Chidi Odiah (CSKA Moscou, Russie) et Danny Shittu (Bolton, Angleterre). Le compartiment défensif des Lions indomptables du Cameroun est exclusivement composé de professionnels : Aurélien Chedjou (Lille), Nicolas Nkoulou (A.S. Monaco), André Bikey (Burnley, Angleterre), Benoît Assou-Ekoto (Tottenham, Angleterre), de même que ceux de la Côte d’Ivoire : Kolo Touré (Manchester City, Angleterre), Emmanuel Eboué (Arsenal, Angleterre), Siaka Tiene (Valenciennes, France), Arthur Boka (VFB Stuttgart, Allemagne) et de l’Algérie : Madjid Bougherra (Glasgow Rangers, Écosse), Rafik Halliche (Nacional, Portugal), Antar Yahia (Bochum, Allemagne) et Nadir Belhadj (Portsmouth, Angleterre). Tous en majorité des destructeurs efficaces qui ne craignent pas de se frotter aux avants les plus percutants. On ne pourra plus reprocher aux Africains leur « naïveté défensive ». Ils ne se laissent plus surprendre et s’y connaissent pour fermer l’accès des buts.
Les héritiers de Milla
Il en est de même pour les hommes de milieu. Au sein des six équipes africaines, ils sont pléthores, les demis récupérateurs et solliciteurs, tous coulés dans le même moule que leurs homologues d’Europe ou d’Amérique du Sud, et tous convertis aux exigences du football dit « moderne ». Citons les Ivoiriens Didier Zokora et Romaric (F. C. Séville, Espagne) et Yaya Touré (F. C. Barcelone, Espagne), les Camerounais Alex Song (Arsenal), Jean Makoun (Olympique de Lyon, France), Georges Mandjeck (Kaiserslautern, Allemagne) et Stéphane Mbia (Marseille, France), les Nigérians Mike Obi (Chelsea), Dickson Etuhu (Fulham, Angleterre), Oluwaseyi Olofinjana (Hull City, Angleterre) et Kalu Uche (Almeira, Espagne), les Algériens Karim Ziani (Wolsburg, Allemagne), Mourad Meghni (Lazio Roma, Italie) et Karim Matmour (Borussia Monchengladbach, Allemagne) et les Ghanéens Michael Essein (Chelsea), Sulley Muntari (Inter Milan, Italie), Anthony Annan (Rosenborg, Norvège), Kwadwo Asamoah (Udinese, Italie) et Emmanuel Agyemang Badu (Al Sod, Qatar).
Reste à parler de la richesse légendaire des équipes africaines : les attaquants. Bien sûr, le fabuleux et vieux retraité Roger Milla ne foulera pas le gazon sud-africain. Ceux qui ont repris l’héritage sont nombreux, mais il n’est pas dit qu’ils ont fait oublier le vieux Lion. La Côte d’Ivoire est, sans discussion, la mieux lotie dans le domaine offensif avec les talentueux Gervinho (Lille), Baky Koné (Marseille), Aruna Dindane (Burnley), Salomon Kalu et Didier Drogba (Chelsea). Elle est suivie par le Nigeria, avec Yakubu Aiyegbeni (Everton, Angleterre), Ozase Odemwingie (Lokomotiv Moscou), Obinna Nosofor (Malaga, Espagne) et Obafemi Martins (Wolsburg), le Cameroun avec Samuel Eto’o (Inter Milan) et Achille Webo (Real Majorque, Espagne), le Ghana avec Asamoah Gyan (Rennes, France) et Matthew Amoah (NAC Breda, Hollande) et l’Algérie avec Abdelkader Ghezzal (Sienne, Italie) et Rafik Saïfi (Al Khor, Qatar).
Des défenseurs qui assurent, des demis qui ne rechignent pas à la tâche et de bons attaquants, mais aussi, un talon d’Achille : des gardiens de but qui ne rassurent pas.
Thomas Nkono (Cameroun), en 1990 et Tony Sylva (Sénégal), en 2002 ont prouvé qu’on ne réussit pas un bon parcours en Coupe du monde sans un « goal » qui fait gagner des points et non qui en coûte. À l’exception de l’Ivoirien Barry Copa (Lokeren, Belgique), ses homologues camerounais Carlos Kameni (Espanol Barcelone), nigérian Vincent Enyeama (Hapoel Tel Aviv, Israël), algérien Faouzi Chaouchi (Wifak Sétif) et ghanéen Richard Kingson (Wigan, Angleterre) n’ont guère convaincu ces derniers mois. Leur niveau reste très moyen.
Le bilan de 2006
Ce handicap n’efface pas les atouts techniques des six sélections africaines dont les effectifs, hormis de celui de l’Afrique du Sud, comptent entre 95 % et 80 % d’expatriés. Atouts s’ajoutant à un environnement matériel, médical et technique plus relevé que d’habitude, qui permettent d’espérer une hausse du niveau des performances (de l’ordre de 30 % à 40 % de plus par rapport à la Can) des équipes africaines en phase finale de la Coupe du monde. Qu’on se souvienne du piètre rendement des Lions indomptables lors des Can 82 et 90 et de leurs exploits d’Espana 82 et d’Italia 90. Idem pour l’Algérie en 1982, pour le Maroc en 1986, pour le Ghana en 2006…
Est-ce à dire qu’il faille verser dans un optimisme béat et pronostiquer l’accession d’une équipe africaine en demi-finales ou en finale de South Africa 2010 ? Faut-il partager l’avis des anciennes stars Abedi Pelé et Georges Weah qui n’hésitent pas à prédire un triomphe africain en Afrique du Sud, alors que le champion du monde 1970 et ancien capitaine de l’équipe du Brésil, Carlos Alberto, déclare : « Aucune équipe africaine ne gagnera la Coupe du monde en 2010. Je n’en vois pas une capable de battre le Brésil, l’Argentine, l’Espagne, l’Allemagne ou l’Angleterre. Chez les cadets et les juniors, les Africains peuvent gagner, mais pas chez les seniors : ils ont de bons joueurs mais ne sont pas assez professionnels. Ils sont trop individualistes. »
L’objectivité élémentaire oblige à faire des constats qui rejoignent le point de vue de Carlos Alberto. Il y a d’abord le bilan africain en 2006. Il fut assez déficitaire : 10 matchs joués par les 5 équipes africaines (Angola, Côte d’Ivoire, Ghana, Togo et Tunisie), 3 victoires, 3 nuls et 10 défaites, 14 buts marqués et 26 encaissés. Depuis la Coupe du monde 2006 et jusqu’en avril 2010, aucune sélection africaine n’est parvenue, lors de multiples confrontations amicales, à s’imposer face à une formation européenne ou sud-américaine de top niveau.
Plusieurs éléments expliquent ces résultats négatifs. Et en premier, le fait que les équipes africaines ne surprennent plus leurs adversaires d’Europe ou d’Amérique du Sud : la majorité de leurs joueurs expatriés sont connus, et la télévision permet de les voir en action sans avoir à se déplacer. De plus, pour les techniciens européens ou sud-américains, affronter des formations africaines hors compétition est une manière de les jauger et surtout de les exorciser, d’autant qu’ils les savent assez mal préparées pour ce genre de rendez-vous.
Et pour cause : l’instabilité des sélections nationales et de leur encadrement paraît – hélas ! – être une règle en Afrique. Jugez-en : depuis le Mondial 2006, la Côte d’Ivoire, le Cameroun et le Nigeria ont changé quatre fois d’entraîneur ! L’Afrique du Sud trois fois et le Ghana deux fois. Ne parlons pas de la valse des présidents des fédérations de football et parfois même des ministres de tutelle… Au coup d’envoi de South Africa 2010, les représentants africains (à l’exception de l’Algérie) seront dirigés par des techniciens étrangers : le Français Paul Le Guen pour le Cameroun, les Suédois Sven-Goran Eriksson et Lars Lagerback respectivement pour la Côte d’Ivoire et le Nigeria, le Serbe Milovan Rajevac pour le Ghana et le Brésilien Carlos Alberto Pareira pour l’Afrique du Sud.
C’est presque un record dans l’histoire du football africain, qui vaut quelque part constat de faillite. Que, cinquante ans après les indépendances, les pays africains ne puissent pas présenter d’entraîneurs nationaux dignes de conduire leurs sélections en Coupe du monde, quel aveu d’échec ! Et l’histoire de la compétition mondiale est là pour nous apprendre qu’aucune équipe n’a remporté le titre de champion du monde avec un encadrement technique non national. Non que les experts venus d’ailleurs ne soient pas compétents mais, parce que seul un entraîneur national est en mesure de préserver la culture footballistique d’un pays et d’être en harmonie avec la mentalité sportive de celui-ci. Mais ce serait trop demander aux décideurs sportifs, qui tordent régulièrement le cou à la logique, que de leur demander de faire pleinement confiance à un cadre local. Peu leur importe le risque d’acculturation sportive : ils n’hésitent pas à recruter des entraîneurs épargnants. C’est-à-dire qui leur épargne les soucis et les conflits et tant pis si ces « experts » sont passés maîtres, sur le plan du jeu, dans l’art du calcul et de… l’épargne.
Comment, par ailleurs, ne pas douter de la justesse d’un recrutement effectué à trois mois du coup d’envoi du Mondial 2010 ? MM Eriksson et Lagerback, embauchés pour un contrat à durée déterminée (trois mois), n’ont commencé à travailler qu’en… mai. Certes, la « magie » des « sorciers blancs » peut faire croire aux miracles, mais tout connaisseur averti et non fâché avec la rationalité du football sait pertinemment que, pour bâtir une équipe réellement compétitive, il faut du temps et un travail assidu.
Il serait vain de croire qu’un projet de jeu se met, d’un simple coup de baguette magique, en place en quelques semaines. On aura au mieux du fast food ou une recette bricolée qui permettra de faire illusion, d’autant que le principal objectif de nos experts (qui vont tous retrouver un job après le Mondial) est d’arriver au terme de leurs contrats sans coup férir. D’où, inévitablement, leur souci de « ne pas gâcher » et d’éviter tout accident.
Tous produits du conformisme européen, ils ne vont pas se priver, par vanité et par indigence intellectuelle, d’imposer à leurs joueurs ce qu’ils considèrent comme le fin du fin du progrès en matière sportive : le jeu défensif et la spéculation sur la contre-attaque. Le Serbe Rajevac l’affirme : « Vous voulez du beau jeu ? Moi, je veux gagner. Seul le résultat compte. Nous ne sommes pas là pour faire du spectacle. » Pas étonnant qu’à la Can 2010, l’on se soit ennuyé ferme en regardant les matchs du Ghana.
Un autre danger guette les représentants de l’Afrique au Mondial 2010 : la sévérité de l’arbitrage. Dès 1990, les joueurs africains, sans qu’on puisse les taxer de recourir à la violence préméditée, ont eu maille à partir avec les hommes en noir. En 2002, les cinq équipes africaines ont « récolté » 42 (cartons jaunes ?) et commis 308 fautes (dont 101 par le Nigeria) ; enfin en 2006, la « moisson » fut de 52 avec 341 irrégularités.
À la décharge des joueurs, il faut dire qu’ils ont payé, à leur insu, le laxisme des sifflets africains (voir la Can 2010) qui ont souvent tendance à ne pas sanctionner sévèrement les irrégularités et le jeu dur. Les chiffres cités ci-dessus doivent inciter les entraîneurs des équipes africaines à donner des consignes de prudence et de fair-play, d’autant plus que les décideurs de la Fifa font obligation aux arbitres de réprimer sans pitié les actes d’antijeu. Et qui veut aller loin ménage les chevilles de l’adversaire.
La « politique du ventre »
Dans leur remarquable ouvrage intitulé Fifa and The contest for World Football, le sociologue John Sugden et le professeur d’université Alan Tomlison ont, en 1998, écrit : « L’Afrique est en mesure, de temps en temps, de faire plier des équipes de niveau mondial comme l’ont fait le Cameroun lors d’Italia 90 ou le Sénégal en 2002. Et, oui bien sûr, l’Afrique peut un jour gagner la Coupe du monde. Mais, aussi longtemps que la “politique du ventre” sévira dans l’administration du football en Afrique – notamment la gestion irresponsable des indispensables ressources matérielles au profit impitoyable de quelques individus –, le formidable potentiel, indispensable à un véritable développement du continent, ne sera jamais réuni. » Constat implacable, toujours d’actualité, mais qui pointe le doigt, au-delà des résultats sportifs, sur la gestion des exceptionnelles retombées financières de la Coupe du monde. Et cela est un autre débat.
Aux six représentants de l’Afrique en Afrique du Sud, nous leur souhaitons de se libérer, de retrouver, quelle que soit la valeur de l’adversaire, ce qui a fait sortir le continent de l’ombre et qui fera un jour sa grandeur : son goût inné du jeu de création, son goût de l’offensive. Le football africain se joue devant, messieurs les « sorciers blancs », ne l’oubliez pas !