Dans un contexte de pourrissement de la situation politique et sociale, et à l’approche de la Conférence nationale de l’ANC, en décembre prochain – en principe – les assassinats politiques se multiplient.
Selon le rapport de la Commission d’enquête Moerane, mise en place en octobre 2016 et dirigée par l’avocat Marumo Moerane, 45 conseillers municipaux ont été assassinés, en Afrique du Sud, depuis l’arrivée de Jacob Zuma au pouvoir, en 2009. Depuis 2016, après les élections générales, ces crimes ont touché un certain nombre de représentants de haut niveau, comme l’ex-secrétaire général de la Ligue ANC de la jeunesse (ANCYL), Sandiso Magaqa, 35 ans, le 13 juillet, à Durban et ses compagnons, Nonsikelelo Mafa et Jabi Mzizi, tous deux conseiller de districts de Umzimkhulu, qui revenaient d’une réunion régionale de l’ANC. Un assassinat qui a particulièrement marqué l’opinion publique sud-africaine d’autant que les trois militants s’étaient particulièrement engagés dans la lutte contre la corruption et la mauvaise administration de ce secteur.
Au cours de ces huit années, ont été tués cinq élus de la province de l’Eastern Cape, un dans le Free State, quatre dans le district de Gauteng, sept dans le Mpumalanga, trois dans la province du Nord-Ouest, un dans le Western Cape et 24 dans KwaZula-Natal (KZN) où les violences au sein même de l’ANC sont particulièrement meurtrières.
Le 2 octobre, un ex-élu de l’ANC (2011 à 2015) et militant de longue date, Richards Bay, était exécuté au nord de Durban. Bongani Reginald Msomi 42 ans, a été froidement exécuté au court d’un concert. Selon le Département provincial de gouvernance coopérative et des Affaires traditionnelles (COGTA), les assassinats politiques dans dix-huit municipalités du KwaZulu-Natal pourraient les rendre ingouvernables. « Le Département considère ces incidents violents comme un mécanisme dangereux qui pourrait plonger les municipalités de la province dans le chaos et l’état d’ingouvernabilité », déclarait Nomusa Dube-Ncube, la ministre du COGTA, exprimant, en même temps, sa « confiance dans la justice ».
« Les assassinats politiques au KZN continuent de priver notre province de jeunes gens prometteurs, a déclaré le dirigeant du parti d’opposition Democratic Alliance du KZN, Zwakele Mncwango. Nous espérons que la Commission Moerane donnera un cadre d’intervention qui peut être utilisé pour mettre fin à ce carnage ». Il dénonce, également, les « manoeuvres dilatoires » de l’ANC devant la Commission. « Nous pensons qu’aussi longtemps que l’ANC ne s’engage pas sur une date de présentation devant la Commission, ces assassinats politiques continueront », ajoute-t-il.
Selon les témoins et les analystes politiques qui ont témoigné devant la Commission, ces crimes sont motivés par la « course aux postes » et « la volonté d’éliminer ceux qui demandent qu’il soit mis un terme aux irrégularités ».
Ces assassinats au sein de l’ANC risquent de se multiplier à l’approche de la cruciale Conférence nationale de l’ANC, en décembre, qui doit élire le (ou la) successeur de Jacob Zuma. Certaines conférences régionales préparatoires devant élire les délégués, ont déjà fait l’objet d’incidents violents et de procédures devant les tribunaux pour fraude, les deux camps pro- et anti-Zuma s’affrontant désormais ouvertement.
Dans un tel contexte, la décision de la Cour Suprême d’Appel de confirmer le jugement de la Haute Cour de Justice, qui avait validé, en 2009, les accusations de corruption dont faisait l’objet Jacob Zuma – abandonnées en 2008 par la National Prosecuting Authority – prend une nouvelle dimension. Le président fait l’objet d’un certain nombre de chefs d’accusation pour fraude, corruption et racket. La procédure engagée par la Democratic Alliance aura duré huit ans, mais il semble, désormais, certain qu’à moins que Jacob Zuma ne fasse appel au Conseil constitutionnel, il ne pourra plus échapper à la justice, malgré les menaces à peine voilées des plus radicaux des membres du clan Zuma au sein de l’ANC.