Une enquête du Trésor auprès de deux banques britanniques, HSBC et Standard Chartered, en relation avec les accusations de corruption dont font l’objet le président sud-africain, Jacob Zuma, son entourage et la famille mafieuse Gupta ? Telle est la requête adressée au Parlement britannique, par Lord Peter Hain, membre éminent du Labour Party et ancien militant très engagé de la lutte contre l’apartheid.
Le document liste quatorze affaires commerciales « liées aux Gupta », la famille de milliardaires indiens proche de Jacob Zuma, accusée, en Afrique du Sud de corruption, fraude et « capture d’État ». La liste inclut, également, outre le président, son ex-femme, Nkosazana Dlamini-Zuma, candidate à la succession de Jacob Zuma, ses fils Duduzane, Edward et Mxolisi, sa fille Duduzine, son neveu Khulubuse, ses femmes Bongi Ngema-Zuma et Thobeka Madiba-Zuma, les frères Gupta Ajay, Atul et Rajesh, leur partenaire en affaires Salim Essa, et l’ex-PDG de la compagnie nationale d’énergie Eskom, Brian Molefe, remercié suite au scandale Eskom.
Cette requête auprès du Parlement fait suite à une demande à Lord Peter Hain par des « historiques » de l’ANC « Ce sont des gens que j’ai connus pendant des années. J’ai soutenu l’ANC pendant des décennies. J’agis à leur demande », a expliqué Lord Peter Hain à City Press, media sud-africain, en précisant que ses informateurs étaient des « personnalités haut placées dans l’État sud-africain et dans les systèmes financiers ». Des gens « incroyablement courageux qui prennent des risques pour leur emploi et leur vie, qui agissent aussi courageusement que les combattants de la liberté pendant l’apartheid » ajoute-t-il en les qualifiant de « courageux » et « forts ».
Depuis son discours à la Chambre des Lords, Peter Hain est harcelé par les « Zuptabots » (parasites Zuma-Gupta) sur des faux comptes Twitter que l’on pense émaner de la firme britannique publicitaire Bell Pottinger, elle-même impliquée dans un scandale en Afrique du Sud en lien avec les Gupta et Zuma, et rayée de la très puissante organisation professionnelle britannique, l’Association de Relations et Communications.
«Après avoir visité récemment l’Afrique du Sud, écrit Peter Hain dans sa requête, il est clair pour moi que le pays est bloqué par une crise politique, sociale et économique, provoquée par un vaste réseau criminel facilité par une famille indienne-sud-africaine, les Gupta, et la famille présidentielle, les Zuma », écrit Peter Hain qui sa « crainte sérieuse et les questions qui entourent la complicité consciente ou inconsciente des institutions internationales financières du Royaume uni dans le réseau criminel Gupta/Zuma ».
Le Parlement a pris très au sérieux la requête de Lord Peter Hain et donné ordre à la Financial Conduct Authority (l’Autorité de conduite financière) ainsi qu’au Serious Fraud Office (Bureau des fraudes graves) et à la National Crime Agency (Agence nationale du Crime) d’en étudier le contenu « avec soin ».
« Ce n’est certainement pas ce pour quoi que ma mère, Mandela et des milliers d’autres se sont battus, dit-il dans sa lettre. Mes parents ont tout sacrifié et pour quoi ? Pour ces criminels style mafia ? J’ai toujours soutenu la nouvelle Afrique du Sud. Je n’avais jamais pensé que j’aurais, un jour, à intervenir de cette manière ».
Jacob Zuma et ses complices ont, jusqu’ici, réussi à échapper à la justice sud-africaine. L’enquête sur des comptes en Angleterre pourrait accélérer un processus judiciaire aujourd’hui complétement verrouillé.
Les Hain : une famile engagée dans la lutte contre l’apartheid
Lord Peter Hain qui a servi dans les gouvernements de Tony Blair et Gordon Brown, a grandi à Pretoria où sa mère, Adelaine, et son père, étaient des rares militants anti-apartheid de la communauté blanche. Il avait 10 ans lors du premier raid armé de la police raciste dans sa chambre et 11 lorsqu’il assista à l’arrestation de ses parents emprisonnés pendant deux semaines sans mandat. Adelaine fut la seule « blanche » à assister au premier procès de Nelson Mandela à Pretoria, seule assise dans la tribune « Whites only » réservée au « Blancs ». Lorsque Nelson Mandela entra dans le box des accusés, il se tourna vers elle en levant le poing ! En 1966, la famille s’exile à Londres, mais le régime raciste ne les oublie pas. En 1972, une lettre piégée envoyée par les Services secrets d’apartheid à l’étranger leur est expédiée. Dans ses mémoires, « Dehors, Dedans », Peter Hain raconte qu’elle n’explosa heureusement pas.