Après avoir, pendant des années, conditionné des négociations de paix au retrait des troupes étrangères d’Afghanistan, les talibans ont déclaré, le 3 janvier, qu’ils étaient d’accord pour ouvrir un bureau à Doha, au Qatar, afin de faciliter les négociations.
L’annonce a été faite sur le site Voix du Jihad, qu’ils utilisent fréquemment pour diffuser leurs informations. Forte de 130 000 hommes encore aujourd’hui sur le territoire afghan, la coalition internationale, présente depuis 2001, a commencé à retirer des troupes. Le retrait total est prévu pour la fin 2014. Un délai suffisamment court pour que les protagonistes tentent à tout prix de trouver un terrain d’entente. Dans le cadre des négociations sur l’ouverture du bureau à Doha, les Talibans ont accepté trois conditions : l’arrêt des attaques contre la population civile, la rupture des liens avec al-Qaïda en Afghanistan et au Pakistan et le respect de la constitution afghane. De leur côté, ils ont demandé la libération des prisonniers de Guantanamo et l’indemnisation des familles de victimes d’attaques de la coalition.
Pour les Taliban dont les Occidentaux, embourbés depuis dix ans dans une guerre coûteuse financièrement et humainement, ont compris qu’ils étaient incontournables si l’on veut installer une paix durable, il s’agit là d’une demi victoire. Après l’assassinat, en septembre, du représentant pour les négociations de paix d’Hamid Karzaï, des contacts secrets avec les États-Unis avaient permis d’éviter la rupture. Par ailleurs, l’ouverture d’une représentation au Qatar est interprétée par certains spécialistes comme un changement d’attitude du Pakistan. Jusque là, il s’était opposé aux tentatives de contacts entre des responsables talibans avec les Américains et le gouvernement afghan, anxieux de s’assurer que toute négociation irait dans le sens de ses intérêts. L’année dernière, lorsque Tayeb Agha, ancien secrétaire du Mollah Omar, avait eu des discussions secrètes avec les Allemands, les Qataris et les Américains, sa famille au Pakistan avait été immédiatement arrêtée. Mais c’est ce même Tayeb Agha qui, aujourd’hui, a conduit les négociations qui ont abouti à l’ouverture du bureau au Qatar, ce qui n’a pu se faire sans l’accord d’Islamabad. Quant à Hamid Karzaï, l’actuel président, il ne participe pas, pour l’instant aux négociations avec les Talibans. Cependant, en novembre dernier, la Loya Jirga, grande assemblée traditionnelle rassemblant des représentants des tribus, des ethnies et des différentes composantes de la société civile, avait réuni ses 2000 membres venus des 34 provinces, à la demande d’Hamid Karzaï, pour définir la politique à suivre vis-à-vis des Talibans et des États-Unis. Elle s’était déclarée « favorable à des pourparlers avec les insurgés talibans renonçant à la violence ».