L’Afrique du Sud reconnaît implicitement son erreur en intégrant le BRIC, qui dès lors devient le BRICS
L’Afrique du Sud fait volte face. Après avoir voté la résolution 1973 du Conseil de sécurité de l’Onu, autorisant le bombardement de la Libye, sous prétexte de « protéger les civils désarmés » contre la machine de guerre de Kadhafi, elle appelle désormais à mettre fin à ces bombardements. Le rejet par les insurgés de l’initiative de l’Union africaine a contrarié le président sud-africain Jacob Zuma, qui s’estime mal payé en retour dans cette affaire. Car c’est grâce aux trois voix africaines (Afrique du Sud, Gabon et Nigeria) que la résolution a pu être adoptée. Il sera très critiqué pour ce vote dans son pays et au sein de l’ANC. Il aurait dû, au moins s’abstenir, comme l’ont fait les quatre pays du BRIC, plus l’Allemagne.
En intégrant le BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine), il admet implicitement son erreur de jugement. Car ce n’est pas en cédant sur des questions de principe, comme le respect de la souveraineté des Etats, la non ingérence et le rejet de l’emploi de la force dans le règlement des conflits entre Etats, pour plaire aux puissances occidentales que l’Afrique du Sud pourra devenir un jour un membre permanent du Conseil de sécurité, mais en s’affirmant également comme une puissance africaine responsable et crédible. L’Afrique du Sud a été admise dans ce club non pas pour sa seule puissance économique (elle reste un nain par rapport à d’autres puissances émergentes avec seulement 3,5 % de croissance par an), mais comme la porte d’entrée d’un pays du continent africain au marché très prometteur. Jacob Zuma l’a bien compris, malgré son faux pas concernant l’affaire libyenne. Il avait d’ailleurs explicitement présenté son pays comme une « porte d'entrée » vers le continent africain et son milliard de consommateurs potentiels.
Toujours est-il qu’à peine admise dans ce club désormais appelé BRICS, lors du sommet de Sanya (Chine), l’Afrique du Sud a apposé sa signature sur une déclaration appelant à une solution pacifique de la crise libyenne, rejetant le recours aux frappes aériennes et saluant l’initiative de l’Union africaine rejetée à la fois par les insurgés de Benghazi et certains pays européens dont la France et le Royaume-Uni.
La position du BRICS, quoique assez générale, ne se limite pas à la Libye.
« Nous sommes profondément préoccupés face à l’agitation au Moyen-Orient, en Afrique du Nord et en Afrique de l’Ouest », dit leur communiqué final assez diplomatiquement. Mais selon des sources diplomatiques informées, les dirigeants des cinq pays ont été plus catégoriques dans leurs discussions que dans leur communiqué final. « Ils ont tous condamné les bombardements », dit cette source.
Rappelons que Jacob Zuma, après sa visite à Tripoli a tenu à se rendre à Alger sur le chemin du retour pour se concerter avec Abdelaziz Bouteflika qui lui a expliqué son refus catégorique des bombardements occidentaux et son soutien à l’initiative africaine.
Aujourd’hui, presque tous les acteurs du conflit sont unanimes à constater que l’option militaire est inopérante. Reste à imaginer les détails et les modalités.