Après un déluge de feu de trois mois, El Gueddafi est toujours en poste, et les appels internationaux en faveur d’un règlement politique du conflit se sont multipliés.
Le fardeau «El Gueddafi» coûte 87 millions d’euros à la France.
Décidément, ce n´est pas gagné pour les forces de l´Otan engagées en Libye. Après un déluge de feu de trois mois sans relâche sur Tripoli, El Gueddafi est toujours en poste. Non seulement il a stoppé l´élan des révoltes arabes, mais ce bédouin de Tripoli fait douter le monde. Depuis avant-hier, les appels internationaux en faveur d´un règlement politique du conflit se sont multipliés laissant entrevoir des doutes de cette communauté internationale.?Après avoir annoncé à plusieurs reprises la fin d´El Gueddafi, l´Italie s´est rétractée. Son chef de la diplomatie, Franco Frattini, a demandé hier, l´arrêt des opérations militaires en Libye, afin de permettre à l´aide humanitaire d´être acheminée aux populations. S´exprimant devant deux commissions parlementaires (Affaires étrangères et Politiques européennes), Frattini s´est rendu à l´évidence en recommandant qu´il est «nécessaire de mettre fin aux hostilités en Libye afin d´ouvrir la voie à l´aide humanitaire».?La trêve préconisée par l´Italie ne sera en fait qu´une porte vers une solution politique négociée. Rome, qui prend part aux opérations militaires en Libye, militait depuis quelques semaines pour cette «solution politique» à la crise annonçant ainsi, par la voix du chef de la diplomatie, la tenue prochaine d´une rencontre regroupant entre 200 et 300 chefs de tribus libyennes pour la réconciliation entre Libyens.?La colonne vertébrale de l´Otan, à savoir la France, la Grande-Bretagne et les Etats-Unis d´Amérique, a montré un certain fléchissement. Ces puissances s´inquiètent, notamment du financement de cette guerre.?En Grande-Bretagne, on commence à s´interroger sur le coût de l´intervention militaire en Libye et les déclarations contradictoires faites par le gouvernement à ce sujet. Estimant le coût de l´action militaire à «quelques dizaines de millions», le ministre des Finances, George Osborne, a été contredit par son secrétaire général, Danny Alexander, qui a soutenu que la guerre coûte à l´Angleterre des centaines de millions de livres. Un mensonge inacceptable aux yeux des Britanniques dont le gouvernement a engagé un sévère plan d´austérité. Le commandant des opérations de la Royal Air Force (RAF), Simon Bryant, a prévenu avant-hier que la capacité de la RAF à opérer en Libye sera «menacée» si l´intervention britannique se poursuit au-delà de septembre. Ce responsable a souligné l´«énorme» sollicitation du personnel et des équipements au cours de l´intervention en Libye. On ne peut plus clair en termes d´alerte. Le Daily Telegraph va plus loin et se pose la question de savoir «si la participation de la Grande-Bretagne en Libye vaut les énormes ressources déployées pour ces opérations militaires», d´autant que le gouvernement s´est engagé dans un plan d´austérité. Les déboires financiers induits par cette guerre touchent également la France et les USA.?Le président Obama a engagé, cette semaine, un véritable bras de fer avec le Congrès. Objet de la discorde: la légalité des opérations militaires en Libye et de leur poursuite. Si le Congres vote la résolution qui coupera les financements à cette guerre, les conséquences seront dramatiques pour les pays de l´Otan.?Le fardeau «El Gueddafi» pèse également sur la France. Près de 87 millions d´euros. Telle a été la facture payée par la France au bout de 80 jours d´opérations militaires, selon une estimation du ministère français de la Défense. Tout comme le Congrès américain, le Parlement français décidera, lui aussi, le 12 juillet, de la poursuite ou non de la guerre en Libye. Dans l´un de ses articles, la Constitution française stipule clairement que «lorsque la durée de l´intervention excède quatre mois, le gouvernement soumet sa prolongation à l´autorisation du Parlement».?Après un long errement qualifié de «lâcheté» par ses pairs, le secrétaire général sortant de la Ligue arabe, Amr Moussa, a insisté hier sur une solution politique à la crise en Libye à travers l´instauration d´un cessez-le-feu «réel» et «sous supervision de la communauté internationale». «Cela doit commencer par un cessez-le-feu réel et sous supervision de la communauté internationale. Jusqu´à la mise en place de ce cessez-le-feu, El-Gueddafi resterait au pouvoir. Il y aurait ensuite une période de transition afin d´obtenir un accord sur l´avenir de la Libye», a déclaré M. Moussa dans une interview au quotidien britannique The Guardian.? La Chine a également souligné son attachement à une solution politique en Libye et qui «doit être trouvée dès que possible» pour mettre fin au conflit. Incroyable revirement de la communauté internationale qui veut revenir à une solution politique après avoir essayé la guerre. N´est-ce pas le monde à l´envers? ?Habituellement, l´action militaire intervient bien après l´échec de la diplomatie. Depuis le début de la crise, l´Algérie a toujours plaidé l´instauration d´un cessez-le-feu et l´entame de négociations entre les parties libyennes dans le cadre de l´Union africaine (UA), des Nations unies et de la Ligue arabe. Finalement, l´Algérie avait raison!
Source : L’Expression (Alger)