Avec beaucoup d‘originalité et d’inventivité, cette jeune artiste sud-africaine brode des toiles en soie qui expriment sa vie et ses désirs.
En Afrique, elle est l’une des artistes plasticiens qui monte, qui monte. Une preuve ? En 2010, après Arco Art Fair à Madrid, elle présente plusieurs de ses œuvres sur la plate-forme « Afriques » lors de la foire d’art moderne et contemporaine Art Paris + Guests et participe ce mois-ci à l’exposition « African Stories », organisée par André Magnin dans le cadre de Marrakech Art Fair (1). Elle, c’est la plasticienne sud-africaine Billie Zangewa.
Enfance voyageuse
Née en 1973 à Blantyre, au Malawi, d’une mère sud-africaine et d’un père malawite, elle connaît une enfance voyageuse. C’est en Afrique du Sud, où elle poursuit ses études supérieures, qu’elle obtient son diplôme des Beaux-Arts, à l’université de Rhodes. Comme elle aime le rappeler, sa « spécialité à l’université était la gravure. J’ai travaillé sur différents supports, comme le bois, mais j’ai très vite découvert la soie et ses reflets. Alors, j’ai commencé à broder, surtout des animaux et des plantes, ma principale source d’inspiration. Il faut dire que j’avais appris la couture et broderie à l’école vers l’âge de 9 ans ».
Sa carrière d’artiste démarre véritablement en 1996 avec une première exposition personnelle, intitulée « Group show », à la Gallery Anne, à Gaborone (Botswana). Mais, précise-t-elle, « ma première exposition de tableaux en soie est intervenue presque dix ans après, en 2004, à Johannesburg, avec la galerie Absa. J’ai gagné un prix pour les collages [Gerard Sekoto Award, ndlr] puis j’ai exposé dans les locaux de l’Alliance française à Johannesburg et au Cap. » Quand on la questionne pour savoir ce qui a motivé ses premiers collages, elle répond sans hésiter : « Les reflets sur le verre des grands immeubles ont été ma première source d’inspiration pour le collage, même si en fait il s’agit de collages sans collage puisque tout est brodé ! » Et puis, Billie a dû aussi travailler dans la mode (elle « adore » toujours les stylistes japonais Issey Miyake et Yohji Yamamoto) et la publicité, car les premières années ont été difficiles. C’est alors que le tissu s’est définitivement imposé.
Elle a commencé à récupérer des bouts de tissus dans les magasins, bouts de tissus qu’elle s’est mise à découper, coudre et assembler avec beaucoup de précision. Mais en prenant toujours soin de laisser des fils apparents pour mettre la matière en évidence. La technique et le style « zangewa » sont nés, identifiables entre tous. Le succès et la reconnaissance internationale suivent. Et Billie d’énumérer : la
7e Biennale de l’art africain contemporain (Dakar, 2006), le prix d’Air Antwerpen (Belgique, 2007), les expositions personnelles en Afrique du Sud, en France, en Belgique, en Espagne, aux États Unis (New York, 2006 et 2008)…
« Je ne crée pas beaucoup de toiles par an, une quinzaine au maximum. Je travaille chez moi, dans mon salon, je m’installe tranquillement, par terre le plus souvent. Je commence à dessiner sur du papier journal. Je découpe le dessin et je l’épingle sur un fond de soie. Et ensuite je commence à coudre », explique-t-elle. Billie s’inspire de la culture populaire, de « toutes les choses qu’elle voit dans la vie » mais, reconnaît-elle, « le sujet central dans mes tableaux, c’est moi et les autres, j’y fais plein de choses : je vole, je danse, je mange, je me repose au soleil… Mon œuvre est le reflet de mes souhaits dans la vie ».
La société va mieux
Quant à la situation politique en Afrique du Sud… elle ne souhaite pas s’étendre. Tout juste concède-t-elle : « Le président Jacob Zuma est un homme comme il faut, avec du caractère et un goût un peu trop prononcé pour les femmes ! Mais il ne fait pas un mauvais travail. C’est mieux que Thabo Mbeki, un vrai désastre…
La société se porte mieux, elle est en train de guérir. Les gens sont très positifs et on vit ensemble plus facilement qu’en Europe et qu’aux États Unis où on voit toujours les couleurs. »
Et l’avenir ? « On ne parle jamais de ses projets… Toujours le tissu,
en tout cas. »
(1) Première Foire d’art
à Marrakech, 8-11 octobre 2010.