Après l'euphorie de l'indépendance, les lendemains risquent d'être moins réjouissants pour les Soudanais du sud.
Selon des informations concordantes et dignes de foi, les divers mouvements de rébellion à l'autorité du président Salva Kiir auraient opté pour un leadership unique. Rôle qu'assumerait le général Peter Gadet dont les troupes sont cantonnées dans le gouvernorat d'Al-Wahda. Objectif visé : étendre l'insurrection à l'ensemble du Sud Soudan, avec comme priorité le contrôle de la plate-forme pétrolière de Bentiu et de Juba, capitale politique du nouvel Etat.
Interrogés sur les motivations de leur fronde, les insurgés pointent "l'incompétence" de Salva Kiir qui se serait accordé de larges pouvoirs dans la Constitution du nouvel Etat et la "corruption généralisée" au sein de l'équipe dirigeante du Sudan People Liberation Movement (SPLM). Et de prendre l'exemple des 15 000 soldats déclarés pour défendre la zone d'Abyei, alors que selon eux, il n'y aurait que 3 000 fantassins sur le terrain ; les 12 000 autres étant fictifs.
Quant aux négociations avec Khartoum, le récent passage sur les bords du Nil de Kostello Garang, conseiller spécial de Salva Kiir, aurait permis d'avancer sur un certain nombre de dossiers, excepté le cas du territoire litigieux d'Abyei.
Ainsi, Afrique Asie est en mesure de révéler que 20-30% des recettes pétrolières seraient destinées à Khartoum pour les cinq années à venir ; un pourcentage qui pourrait retomber après à 5-10%. Cela suffira-t-il à apaiser les relations entre Khartoum et Juba ?
Rien n'est moins sûr.
Un fin connaisseur du nouvel Etat nous informe par ailleurs qu'en termes d'infrastructures, il semble établi que le financement soit acquis pour la construction de deux voies de chemin de fer : Juba-Gulu (Nord de l'Ouganda) d'un coût de 500 millions de dollars ; et Juba-Monbasa (Kenya) évalué à 2-3 milliards de dollars. Il relève aussi qu'en matière d'exploitation du potentiel pétrolier du Sud Soudan, la récente déclaration du ministre des investissements, Deng Oyay, marque un tournant en parlant d'un redécoupage et d'une redistribution possible des grands blocs d'exploration attribués avant les troubles dans les années 80, et notamment du bloc B détenu par une association de plusieurs compagnies conduites par Total. Deng Oyay reproche en particulier aux compagnies de ne pas s'être suffisemment investies ces derrnières années sur leur bloc d'exploration au Sud Soudan.
Rappelons qu'avant l'indépendance effective du Sud Soudan, ces compagnies répondaient qu'elles ne pouvaient pas travailler pour deux raisons majeures : les sanctions contre Khartoum, et les conditions de sécurité sur le terrain peu propices au déploiement d'équipes d'exploration sismique". Même si la situation dans ce domaine a peu évolué, et a même parfois plutôt empiré, ce type de réponse ne risque plus de satisfaire la plupart des membres du directoire du SPLM que l'immobilisme de l'association menée par TOTAL semble de plus en plus agacer. Quelle sera la réponse de TOTAL et de son partenaire aujourd'hui ? Pourra-t-il valoriser le fait qu'elle a maintenu une présence au Soudan pendant trente ans alors que toutes les autres compagnies occidentales ( dont un de leur partenaire) sont parties?
Quels seraient les nouveaux acteurs pétrolirers occidentaux susceptibles d'en "faire plus", tout en étant soumis aux mêmes contraintes légale et sécuritaire ? Le Sud Soudan est il prêt à renforcer la présence de ceux qui ne travaillent pas suivant les mêmes critères et avec les mêmes moyens : les Chinois, les Russes où les petits indépendants ? Wait and see.