Une demande a été faite auprès du Parlement pour la création d’une commission chargée de rechercher la vérité
Dans le sillage de la campagne « Justice pour Sankara, justice pour l’Afrique » lancé en 2009 par un collectif international soutenu par des nombreuses Ong, dont Survie, réclamant une enquête internationale indépendante, des députés français ont demandé le 28 juin la création d’une commission parlementaire à la recherche de la vérité dans l’assassinat du leader burkinabé.
Sous l’impulsion de Noel Mamère, député d’Europe écologie, un groupe de 21 députés de l’opposition de gauche ont présenté une proposition de résolution qui sera renvoyée à la Commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale.
Douze députés burkinabé, dont Me Bénéwendé Sankara, chef de file de l’opposition burkinabè, qui s’est expressément déplacé à Paris, ont sollicité leurs collègues français afin d’entreprendre cette démarche, destinée à faire la lumière sur l’éventuelle implication de la France dans cet assassinat. Au Burkina, toutes les initiatives visant à établir les responsabilités de la mort de Sankara et de ses 13 compagnons, qui eut lieu le 15 octobre 1987 dans les locaux du Conseil de l’Entente, ont été systématiquement bloquées et les plaintes déposées par l’épouse de l’ancien président, Mariam Sankara, et ses deux enfants n’ont jamais abouti.
Le décès de Thomas Sankara est encore à ce jour classifié dans son pays en tant que « mort pour causes naturelles ». Or en ce qui concerne les implications hexagonales, les témoignages faisant état d’une probable intervention des services secrets français se sont multipliés ces dernières années, notamment dans le cadre du procès de Charles Taylor, un protégé du chef de l’Etat burkinabé Blaise Compaoré. Seuls la déclassification des documents internes de la DGSE et l’ouverture des archives pourront clarifier la position française. Noel Mamère a notamment rappelé l’exemple belge : le parlement n’a pas seulement obtenu l’ouverture des archives sur l’assassinat de Lumumba en janvier 1961, mais, face aux preuves de la complicité de Bruxelles, il a également contraint le pouvoir à présenter des excuses au peuple congolais. Le député Vert de la Gironde n’est pas, à vrai dire, très optimiste quant à l’avenir de sa proposition de création d’une commission d’enquête sur un sujet aussi sensible qui touche au controversé passé « françafricain ». La commission pourrait, au mieux, être « rétrogradée » au stade d'une simple commission parlementaire, comme ce fut le cas pour le Rwanda. Me Bénéwendé Sankara (sans liens de parenté avec le défunt chef de l'Etat) – toujours avocat de la veuve de Thomas Sankara – veut croire qu’on lui donnera une suite favorable : au nom des valeurs démocratiques de la France.