130 milliards de dollars, tel est le prix de la paix sociale que le roi Abdallah, allergique à toute idée de printemps saoudien, a payé à ce jour.
Le Royaume le plus riche du monde arabe, ne veut pas de troubles, voire d’insurrections populaires chez ses voisins du Golfe, et, plus encore chez lui. Juste après la destitution des dictateurs de Tunisie et d’Égypte, le roi Abdallah a pris des mesures financières pour neutraliser toute velléité de protestation. Le prix de la paix sociale s’élève à 130 milliards de dollars à ce jour. Augmentation des salaires (attribution d’un double mois aux fonctionnaires), construction de maisons (70 milliards de dollars pour 500 000 unités), subventions généreuses (200 millions de dollars) aux organisations et la police religieuses, les réserves royales qui s’élevaient à 214 milliards de dollars en revenus pétroliers l’année dernière, ont calmé les esprits et fait taire les voix discordantes. Le grand mufti qui protège la famille royale depuis longtemps, a même émis une fatwa disant que l’Islam interdit les manifestations de rue, un message martelé le vendredi dans les mosquées. Mais l’argent ne peut et ne pourra pas faire taire tout le monde, tout le temps. Outre les opposants laïcs ou religieux, dont beaucoup croupissent en prison, le prince Talal Bin Abdul Aziz, 79 ans, frère du roi, connu pour son engagement auprès des agences de l’ONU et de son action pour le développement durable et la défense des plus pauvres, particulièrement les femmes et les enfants, a un autre point de vue. « Ces gens veulent préserver leur pouvoir, leur argent et leur prestige, et donc veulent le statu quo. Ils ont peur des changements dans le monde. C’est un problème car ils sont à courte vue, mais la vraie difficulté est que je ne sais pas comment faire pour changer leur façon de voir les choses. » Selon celui qui était surnommé « le prince rouge », dans les années 1960, les conservateurs représentent une minorité dans la famille royale mais une minorité très influente. En Arabie Saoudite, le mécontentement existe, il est fort, et exige à la fois plus de démocratie, de meilleures conditions de vie et la fin de la corruption. Il semble que les États-Unis et la France, prêts à faire tomber tout régime qui les gêne, l’ignorent.