Les manifestants au Caire et à Alexandrie s’en sont pris aux services de sécurité de l’ancien régime, et en particulier à sa police, accusés d’avoir outrepassé leur mission.
La révolte du Nil, qui a chassé du pouvoir Hosni Moubarak et son clan, continue à faire tomber les symboles de l’ancien régime. Les manifestants, dans la plupart des villes égyptiennes, principalement au Caire et à Alexandrie, s’attaquent désormais frontalement au redoutable appareil de la police politique (Jihaz Amn al Dawla).
Des bâtiments de la sécurité d'État ont été pris d'assaut le 5 mars en Égypte par des manifestants à la recherche de preuves d'abus commis par ce puissant appareil dépendant du ministère de l'Intérieur, dont des militants exigent la dissolution, ont indiqué des témoins.
A Cheikh Zayed, dans la banlieue du Caire, des centaines de manifestants ont tenté de pénétrer dans le siège local de la sécurité d'État. Des employés ont tiré des coups de feu en l'air, avant que l'armée ne s'interpose pour empêcher que le bâtiment soit pris.
La dissolution de ces services, accusés par les organisations de défense des droits de l'Homme d'abus et de torture, est l'une des principales revendications des militants pro-démocratie. L'un des manifestants a affirmé à l'AFP que le but était de s'emparer des dossiers de la sécurité d'État "de crainte que les preuves de violations ne soient détruites". "On pouvait voir la police à l'intérieur en train de brûler des papiers", a-t-il dit. "Les fenêtres étaient ouvertes et des papiers s'envolaient ", a ajouté un autre manifestant, joint par l'AFP par téléphone.
A Marsa Matrouh, ville située au nord-ouest du Caire sur la côte méditerranéenne, un groupe de manifestants a pu entrer dans le siège de la sécurité et s'emparer de documents, avant de mettre le feu au bâtiment d'où s'élevait une épaisse fumée noire, a rapporté un témoin à l'AFP. Les manifestants se sont ensuite attablés à un café non loin de là pour éplucher les papiers récupérés, a-t-il ajouté.
Le 4 mars, des manifestants ont été blessés par balle lors d'un rassemblement réclamant la dissolution de la sécurité d'État à Alexandrie, la grande ville du nord de l'Égypte. L'armée, qui gère le pays depuis la démission sous la pression populaire du président Hosni Moubarak le 11 février, avait dû intervenir pour ramener le calme. Selon un responsable des services de sécurité, près de 100 000 personnes travaillent à la sécurité d'État, sans compter les informateurs. Ce même jour, entourant le nouveau Premier ministre Essam Charaf, les manifestants de l'emblématique place Tahrir au Caire avaient scandé "Le peuple veut la fin de la sécurité d'État". "Je prie pour que l'Égypte soit un pays libre et que ses services de sécurité soient au service des citoyens", a répondu M. Charaf, nommé la veille en remplacement d'Ahmad Chafic.
La colère contre les abus quotidiens et la torture par la police ont été l'un des éléments déclencheurs, le 25 janvier, des manifestations sans précédent contre le régime de M. Moubarak, qui était en poste depuis près de trente ans.
Pilier du système répressif de Moubarak, les services de sécurité et de police, dont les effectifs sont évalués à 1,2 million de personnes, ont été mis en déroute dès la première semaine du soulèvement de la société civile. Le général Omar Souleiman, nommé Vice-président de la république pendant quelques jours avant la démission forcée de Moubarak, a reconnu qu’il faudra quelques mois pour réhabiliter ces différents services.
(Avec les agences de presse)